UN JOUR, PHILIP ROTH SERA MORT, par Jean-Luc Nativelle
La Littérature, Une Marchandise Comme Une Autre
Une Transaction Diabolique
Paul Delambre fils, écrivain à la carrière fulgurante, a été retrouvé mort à son domicile ; tout indique qu’il s’est suicidé.
Mais Pascal Messager, qui se prétend son ami, entend rétablir quelques « vérités utiles ».
Une quinzaine d’années plus tôt, Messager, lui-même écrivain, vivait dans la frustration de voir ses romans refusés par les grandes maisons d’édition.
Résigné à vivre de petits boulots – lecteur, correcteur, écrivain public –il a reçu un soir une proposition qui allait changer sa vie : écrire un livre au succès assuré, et enfin être à l’affiche d’une référence sur le marché éditorial, les éditions Claude Garamont.
Pour Messager, l’heure de la reconnaissance avait enfin sonné. Une consécration en demi-teinte car écrire pour un autre ne va pas de soi : le succès finit toujours par avoir un prix… Reste à savoir qui va le payer !
Un Auteur Sous les Feux de la Rampe
Jean-Luc Nativelle, professeur de philosophie et écrivain, a publié plusieurs essais ainsi que des œuvres de fiction, dont Par Humanité, remarqué par Amnesty International. Son troisième roman, Le Promeneur de la Presqu’île, a été récompensé par plusieurs prix littéraires dont celui des Lecteurs du Télégramme 2013.
Avec son petit dernier, Un Jour, Philip Roth Sera Mort, Jean-Luc Nativelle nous parle d’un revers de médaille qu’il connait bien, de coulisses peu engageantes du marché de la littérature, le sort des nègres et leur condition mais également de la qualité déclinante de ce que nous servent les Grands de ce monde.
La référence à Philip Roth dans le titre n’est autre qu’un clin d’œil de l’auteur à une littérature pleine, vraie, un hommage à un homme qui a décidé, peut être par découragement de laisser tomber la plume fin de l’année 2012.
Pascal Messager, Le Témoin de L’Ombre
Si Jean-Luc Nativelle ne connait que trop bien les rouages pipés d’une industrie littéraire ogresse et que son parcours a été, à l’image de celui de son héros, semé d’embûches et de refus, il ne faut pas pour autant y voir ici quelques chose d’autobiographique.
Certes son travail se trouve d’autant plus empreint de crédibilité et d’authenticité, ayant été le témoin de ce qu’un livre édité dans des conditions marginales ne peut accéder aux sentiers ordinaires du marché du livre qu’après l’obtention d’un prix et donc d’une reconnaissance au préalable; preuve de l’aridité et de la stérilité du travail de certaines grandes Maisons.
Avec Un Jour Philip Roth Sera Mort, l’auteur met le doigt sur un fait de société déconcertant ainsi que sur notre médiocrité, notre inaptitude à porter un regard objectif et personnel sur l’art littéraire en l’occurrence.
Il serait dangereux et mal venu d’y voir ici une croisade ou une quelconque vendetta à l’égard des lobbies qui nous aveuglent et nous matraquent à coup de best-sellers prémâchés, Nativelle ne fait que souligner une triste réalité.
Le roman est à double tranchant, avec un style très incisif et des personnages aux caractères tourmentés et étoffés ; à côté de ce qu’on pourrait décrire comme la machinerie des Grands Méchants, il met en évidence la faiblesse de ces auteurs, appelés « nègres » (une appellation qui m’a toujours chiffonnée mais qui en dit long), prêts à se nier, s’oublier, parfois au service de la littérature, la vraie, parfois au service de leur narcissisme contenu depuis trop longtemps.
Une quête de reconnaissance par procuration… qui se révèle bien vite, comme c’est le cas dans ce roman, comme un pacte avec le Vilain.
Une histoire, un regard qui porte à la réflexion, qui chatouille notre curiosité et notre intérêt pour des écritures restées dans l’obscurité et qui méritent qu’on prenne le temps d’aller les débusquer !!
Une tourmente, un cercle vicieux qui va pousser les personnages dans leurs derniers retranchements...
Note: 4/5