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CHARLY 9, par Jean Teulé

Si Fleur de Tonnerre m'avait laissée un goût amer et un peu dubitative, ma dernière lecture de Mangez-le si vous voulez m'a réconciliée avec la plume de Jean Teulé et incitée à repartir pour une virée historique truculente et aussi décalée qu'abominable.


Charles IX fut de tous nos rois de France l'un des plus calamiteux. A 22 ans, pour faire plaisir à sa mère, il ordonna le massacre de la Saint Barthélemy qui épouvanta l'Europe entière. Abasourdi par l'énormité de son crime, il sombra dans la folie. Courant le lapin et le cerf dans les salles du Louvre, fabriquant de la fausse monnaie pour remplir les caisses désespérément vides du royaume, il accumula les initiatives désastreuses. Transpirant le sang par tous les pores de son pauvre corps décharné, Charles IX mourut à 23 ans, haï de tous. Pourtant, il avait un bon fond.

Cap sur le massacre de la Saint Barthélémy, survenu le 24 août 1572, époque des grands conflits religieux qui agitent le pays et l'Europe, au côté du jeune souverain Charles IX au destin peu enviable. L'intrigue commence d'emblée avec l'ignoble ultimatum posée par Catherine de Médicis – alias le venin florentin – à son Roi et rejeton mal estimé. Un effroyable dilemme qui va sceller le destin de ce jeune monarque pourtant plein d'humanité et le tourmenter jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Charly 9 nous « raconte », faute de sources et preuves historiques irréfutables, l'histoire de ce pacte odieux conclu entre le Roi de France, sa mère et ses partisans, visant à profiter des tensions qui animent le royaume à l'égard de la Réforme afin d'éliminer de gros bonnets de confession protestante. Un couteau placé habilement sur la gorge vacillante de notre souverain, dans un premier temps révolté pour finir résigné, à moitié convaincu par les arguments d'un possible attentat ourdi contre sa personne. Une abdication qui tend, semble-t-il, à s'attacher les bonnes grâces, sinon la tendresse de la matriarche.

MORT OU MESSE

Teulé a le sens de la mise en scène et de la démesure. Dès le début, lors des transactions parlementaires, tout semble prendre des proportions gigantesques. Nous rencontrons les protagonistes, décidant du sort de centaines de vies comme on tape le carton. On commence à envisager une petite dizaine de meurtres pour finalement aboutir à un véritable génocide aux allures d'extermination protestante. le peuple s'embrase et se déraisonne, les corps s'amoncellent, un emballement morbide qui entrainera Charles IX aux confins de la folie sous la formes d'excès de caractère et d'hallucinations sanglantes, incapable de faire face à cette insupportable culpabilité qui ne le quittera pas. N'y tenant plus, Charles IX finit par se transformer en monstre cruel et sanguinaire (quitte à marquer l'histoire, faisons le bien !) tordant le cou à ses alouettes et effrayant ses gens à longueur de journée.


Ce livre est également celui d'un monarque aux rêves brisés, d'un changement de trajectoire radical qui avorte la moindre tentative de réconciliation avec un peuple désavoué et affamé.

Je retrouve ici le style efficace et romanesque de Jean Teulé qui ne manque pas de fleurir son langage et se permet quelques libertés bien contemporaines question flot d'injures dont le héros ne fait pas l'économie. Une version de l'Histoire bien à lui et fort intéressante.



Note : 3.5/5


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