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CLYTEMNESTRE, par Costanza CASATI

Une année qui commence sous les meilleurs hospices avec cette petite pépite face à laquelle mon avidité livresque a succombé avec une rapidité presque navrante, pas fichue d'attendre les fêtes pour m'en emparer. Et quelle claque que ce premier roman signé Costanza CASATI !


Une auteure qui n'a pas froid aux yeux en s'infiltrant avec majesté, à l'instar de son héroïne, dans le monde littéraire. Costanza s'engage ici dans une entreprise périlleuse, la réinterprétation d'un pan de l'histoire mythologique grecque qui nous a tous marqués (si vous savez, ce fameux canasson en bois), à travers les yeux et le coeur de Clytemnestre, princesse de Sparte et « soeur » de la célèbre Hélène de Troie. Une figure féminine peu exploitée dans les lectures qui ont croisées ma route jusqu'alors, qui m'a séduite dès les premières lignes et qui n'est pas sans rappeler notre célèbre Aliénor à certains endroits.


Le récit, très cinématographique, démarre pied au plancher et nous cueille d'entrée de jeu en nous projetant, avec un certain empressement, si ce n'est avec violence, dans l'univers redoutable de la jeune Spartiate. Une épopée dans laquelle on oscille entre fascination, dégoût et révolte en finissant parfois par normaliser l'abomination au prix de l'équilibre social.



Mère…


Clytemnestre rayonne par cet élan maternel qui la caractérise depuis son plus jeune âge, preuve en est de cette relation plus que sororale qu'elle entretient avec Hélène, future promise de Ménélas, en se démenant pour la préserver de toutes les offenses et les affres que la vie lui réserve, telle une louve aux aguets.


Et c'est avec non moins de dévouement qu'elle veillera sur sa progéniture tout au long de l'intrigue, avec parfois la rudesse et la dureté qu'on lui connait, sans jamais rien sacrifier à l'écrin de douceur dont elle les enveloppera.


La maternité et ses maux est d'ailleurs un point central du roman. Clytemnestre force l'admiration en parvenant, je ne sais par quel moyen, à se relever, du moins en apparence, après deux fins du monde. Une prouesse terrible et inenvisageable pour la mère que je suis. En public, elle tient debout, et se poste ici comme une figure de la résilience absolue, mais dans l'ombre, un autre jeu se trame : Clytemnestre ne tient pas, elle n'est déjà plus là, la vie l'a broyée de ses innombrables atrocités, ne laissant qu'une coquille vide bouillonnant de haine et un coeur décimé.


Monarque…


Juste, d'une grande noblesse d'âme et d'esprit libre, ce n'est pas un hasard si elle suscite le respect et l'intérêt des plus grands qui lui prêtent une oreille attentive face aux grands enjeux politiques et l'incluent, souvent par la contrainte et la ruse, dans leurs desseins. On entrevoit rapidement la reine sublime d'autorité et de charisme qu'elle deviendra. Un cœur brave, épris de liberté et non égotique.


Meurtrière…


Femme féline et vigoureuse, élevée dans la violence et les coups, Clytemnestre est une guerrière que le danger ne semble pas beaucoup effrayer, ni les convenances embarrasser lorsqu'il s'agit de protéger la vie et l'honneur des siens.


Criminelle, elle le devient par la force des choses et il est difficile de le lui reprocher. Son entièreté ne peut tolérer la rédemption. Elle n'est pas femme à se vouer au courroux des dieux et prendra rapidement son destin en mains.


Magnifique…


Clytemnestre est vive, combattante hors pair mais l'auteure ne la cantonne pas dans un rôle trop exigu, étroit et surfait d'héroïne que le jeu et les maux de l'amour qui animent les jeunes personnes de son âge laisseraient de marbre. Elle parvient brillamment à éviter cet écueil de marginalisation qui reviendrait à souligner le caractère encore plus exceptionnel de son personnage. Clytemnestre est une sensorielle, primitive, sans pour autant concéder une parcelle de son indépendance, elle est à l'écoute de son corps, passionnée, chasseresse que l'adrénaline et l'exaltation du sentiment amoureux ne laissent surtout pas indifférente.


De nombreux hommes croiseront sa route. Tantale, Roi de Méonie, au verbe délicat et à l'intelligence d'une élégance rare. Agammemon, un homme bestial et sanguinaire ravagé par un feu dévorant que mêmes les intempéries divines ne sauraient contenir. Une infamie qui aura le malheur de poser les yeux sur elle et de signer la chute de notre héroïne.


Mais Clytemnestre n'a pas dit son dernier mot et gare à ceux qui l'auraient mal jugée…



Note :4,5/5

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