SAUVAGE, par Julia KERNINON
La proposition est alléchante; la couverture, riche d'une éclosion presque explosive dont on se régale par avance; l'éditeur, un habitué de mes étagères en chêne; l'auteure, pleine de nouvelles promesses... et pourtant, je sors de cette lecture assez dubitative et encore sur le quai à attendre ma virée avec cette héroïne qui n'a de Sauvage que le patronyme.
L'univers avait tout pour me faire succomber, une jeune femme passionnée et "toquée", évoluant avec grâce dans ses quartiers culinaires au rythme d'un ballet bien orchestré, artisane subtile de mets incroyables ravissant nos papilles. On entrevoit assez aisément où l'auteure veut nous emmener : la recherche de l'équilibre entre un travail dévorant et la vie de famille avec tout ce qu'elle comporte, comment naviguer entre ces différents mondes, donner suffisamment de soi à chacun afin qu'aucun d'eux ne se sente lésé, sans toutefois s'oublier, s'abîmer... en clair, les questionnements existentiels des femmes (et sans doute pas que) de cette dernière décennie.
Alors je veux voir de plus près, goûter à ce tourbillon de saveurs et de déchirements introspectifs, exulter ! Mais la mayonnaise ne prend pas.
Les mots s'entremêlent avec finesse et une certaine poésie, la partition est travaillée, et pourtant je ne parviens pas à y trouver de la justesse, de l'authenticité, Ottavia me laisse aussi froide qu'un plan de travail en inox, là où d'autres protagonistes, pour ne citer que son époux ou sa mère, me touchent par leur sincérité et leur singularité. Ses états d'âmes et turpitudes amoureuses (oui, parce qu'Ottavia est une femme très convoitée) sonnent creux et finissent par envahir tout l'espace narratif. Là où j'attendais de voir une émancipation folle, un coeur battant à tout rompre, je suis coincée aux prises avec sa torpeur. La reine du bal ne daigne pas nous accorder une seule danse et semble rester figée, spectatrice de la vie qui s'agite autour d'elle.
Note : 2,5/5
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